Le luxe fait sa révolution

Petit séisme dans l'industrie du luxe. Pour sa nouvelle ligne de maquillage « Nu », Yves Saint Laurent a choisi Chella Man, artiste et activiste, trans et sourd, comme égérie. Dans un spot diffusé sur Instagram, l'artiste s'exprime autour de sa dysphorie de genre et du sentiment de libération que lui a procuré sa mammectomie.

Il est également la première égérie transmasculine, ce qui est un chamboulement en soi dans le secteur des cosmétiques de luxe, où l'on a l'habitude de voir surtout des femmes cisgenres.

Chella Man s'est fait connaître sur les réseaux sociaux, et notamment sur YouTube où il documente son parcours de transition depuis 2017. Il est aussi l'auteur d'un livre, Continuum, et le fondateur d'une marque de bijoux destinés à embellir les appareils auditifs - que l'on voit d'ailleurs dans la vidéo.

Le gouvernement a dévoilé cette semaine sa campagne nationale intitulée « Voyons les personnes avant le handicap », qui veut aider la société française à changer de regard sur le handicap. Et ça ne passe pas du côté des associations et des personnes concernées.

Pour reprendre les arguments de Paye ta Psychophobie développés dans cet excellent post, il y a d'abord celui de l'argent : la campagne, 3 films et 10 portraits, a coûté près de 3,5 millions d'euros, alors que l'Allocation Adulte Handicapé (AAH) plafonne toujours à 900€/mois et que les débats autour de la déconjugalisation de l'aide sont toujours en cours.

Les associations regrettent également que la campagne ait été réalisée uniquement par des personnes valides, ce qui impacte forcément la façon dont les personnes handicapées y sont représentées : tous les handicaps présentés sont des handicaps visibles, alors que près de 80% des handicaps sont invisibles.

Cerise sur le gâteau : une campagne hors de prix, alors que le gouvernement traîne des pieds depuis des décennies sur les questions d'accessibilité et de discriminations liées au handicap.

Après des années de lutte informelle contre le concours Miss France, le collectif Osez le Féminisme passe à la vitesse supérieure et porte officiellement plainte devant le Conseil des Prud'hommes de Bobigny. Le collectif estime que le concours est sexiste et qu'il enfreint le code du travail.

En effet, pour se présenter, les candidates à Miss France doivent satisfaire à un certain nombre de critères, notamment physiques : elles doivent par exemple mesurer au moins 1m70, ne pas avoir de tatouages, et être célibataires. Or, le Code du Travail interdit les critères liés à l'âge, au physique ou à la situation familiale. Et même si les Miss ne sont pas officiellement liées par contrat de travail avec le concours, les avocat·es d'Osez le Féminisme espèrent faire valoir un cas de jurisprudence datant de 2013 et concernant le concours Mister France.

Quant à l'aspect sexiste du concours, je doute qu'il soit nécessaire de développer. En 2019, le Haut Conseil à l'Égalité entre les femmes et les hommes a d'ailleurs qualifié le concours de « caricature archaïque », c'est dire.

La polémique enfle dans le milieu de la culture : Wajdi Mouawad, directeur du Théâtre national de la Colline à Paris, a indiqué dans un communiqué qu'il ne déprogrammerait pas Bertrand Cantat, qu'il a sollicité pour composer la musique de son prochain spectacle. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que la décision fait jaser.

Il y a d'un côté celleux qui se rangent du côté de Mouawad et Cantat, arguant que celui qui a tué Marie Trintignant en 2003 à Vilnius a payé sa dette en passant 4 ans en prison.

De l'autre côté, il y a celleux qui ne comprennent pas comment en 2021 on peut encore mettre des auteurs de féminicides à l'honneur dans des institutions publiques, alors que le combat contre les violences sexistes et sexuelles fait rage, et que le mouvement #metootheatre prend de l'ampleur pour dénoncer ces mêmes violences dans le secteur du spectacle vivant.

Je vous laisse le soin de deviner dans quelle catégorie je me trouve.

Croyez-le ou non, aujourd'hui dans Visibles, on parle des algorithmes informatiques en bien. Et c'est Sephora qui est à l'origine de ces bonnes nouvelles : pour pouvoir mettre en avant la beauté des femmes noires, célébrée dans sa campagne Black Beauty is Beauty lancée en août, l'entreprise s'est attaquée aux biais racistes des moteurs de recherche, et en particulier de Google.

L'entreprise s'est ainsi associée à une agence de consulting en innovation, R/GA, pour mieux valoriser sa campagne et ses produits lors des recherches avec les mots-clés black beauty. Car jusqu'ici, et contrairement à des recherches comme french beauty ou k beauty (beauté coréenne) où de nombreux visages et de nombreuses marques apparaissent dans les résultats, la recherche Black Beauty débouche sur le roman d'Anna Sewell de 1877 et ses adaptations à l'écran.

Cette initiative, de même que la campagne Black Beauty is Beauty qui veut mettre en avant les marques créées par des personnes noires, s'inscrit dans une démarche plus globale de la part de Sephora. L'entreprise a par exemple mené en 2021 une très large étude sur les biais racistes et leurs conséquences sur l'accueil du public en magasins.