Au delà du regard de l'anthropologue et de son interprétation sur les pare, ce qui est marquant dans ce chapitre d'Aku-aku, c'est le regard de simple visiteur qu'adopte l'auteur norvégien, employant parfois des accents lyriques pour évoquer l'île et ses mystères.
Je cite :
« La terre suivante que nous avions vue était Rapaïti. Elle semblait voguer sur la mer comme un monde irréel au milieu des bancs de nuages du sud-est. Du large déjà nous pouvions voir à la jumelle que les sommets les plus élevés avaient quelque chose d'extraordinaire. Ils ressemblaient aux pyramides du Mexique couvertes de végétation ou aux fortifications incas abandonnées dans les montagnes sauvages du Pérou. »
Un peu plus tard, il évoque plus précisément Morongo Uta :
« En face de nous, sur le sommet suivant, se dressait le château de conte de fées, plongé dans un sommeil séculaire comme la Belle au bois dormant. Ensorcelé, envahi par des arbres et des plantes grimpant au dessus des tours et des murs, il restait là, tel que l'avaient laissé le roi et tous ses hommes, à l'époque où le monde croyait encore aux contes.
Je frémis d'émotion quand, ayant longé la dernière, nous approchâmes de ce château féérique. Puissant et majestueux, il se dressait devant nous contre un fond irréel de nuages à la dérive, de pics et d'aiguilles pourpres. Bien qu'il parût suspendu à la voûte céleste, ce vieux bâtiment avait quelque chose de presque souterrain, puisqu'il ne pouvait pas se débarrasser de la tourbe de forêt vierge et de verdure, dont la végétation pendait le long de ses murs comme une fourrure. »